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    RUE SAINT-DENIS
    Ier et IIème arrondissements de Paris

    (Histoire de Paris rue par rue, maison par maison, Charles Lefeuve, 1875)
     

    Notice écrite en 1881.

      

    Quartier de la ROQUETTEDu côté de la place du Châtelet, qui n'avait pas encore ses deux théâtres, la rue Saint-Denis se renouvelait et s'aérait. A cette extrémité, coupe sombre ! On ne s'y reconnaît en rien près de la rue Rivoli prolongée. La vraie rue Saint-Denis ne se remontre ça et là qu'à partir des maisons qui portent aujourd'hui les chiffres 11 et 12. D'autres tronçons s'y sont mis à l'alignement du premier, derrière d'autres façades qui tombaient, aux angles des rues élargies ou nouvelles. Ces éclaircies, par conséquent, ont profité à la rue Lareynie, qui avait été si étroite ; à la rue Berger en ce qui s'en appelait naguère Aubryle-Boucher ; à la rue de la Cossonnerie, qui ne s'est pas contentée d'avoir sa large part de l'ancienne cour Batave ; aux rues de la Grande-Truanderie, du Oigne et aux Ours ; à la nouvelle rue de Turbigo ; à la rue du Petit-Lion, maintenant Tiquetonne prolongée, et à la nouvelle rue Réaumur. Le percement d'un boulevard parallèle, répondant à de nouveaux besoins de circulation, n'aurait-il pas dû épargner à la vieille rue Saint-Denis cette dislocation ?

      

    Commençant : avenue Victoria, 12. Finissant : boulevard de Bonne Nouvelle, 1, et boulevard Saint-denis, 19. Monument classé : Eglise Saint-Leu-Saint-Gilles. Historique : Ancienne voie romaine (chemin de Flandre) conduisant à Saint-Denis. Bordée de maisons dès 1134, elle a porté les noms de la Sellerie de Paris et de la Sellerie de la Grande Rue (XIIIe siècle) ; grand'rue de Paris ; grande rue ou rue des Saints Innocents et grant chaussée de Monsieur ou grant chaussée de Monseigneur Saint-Denis (XIVe siècle). Pendant la Révolution, on l'appelait rue de Franciade.

    Quartier de la ROQUETTE

    Tombes retrouvées à la verticale du maître-autel dans les années 1950
    Elles sont attribuées aux saints martyrs Denis, Rustique et Eleuthère.

      

     

    Origine du nom : Ancienne route de Saint-Denis.

    Le Tombeau. – Gastines. – Les Enseignes. – Le Père d'Eugène Scribe. – Les Catherinettes. – Santeul, Rapin et Cie. – Le Sépulcre. – Saint-Magloire. – Saint-Leu. – Le Passage Saucede. – La Cour des Bleus. – La Trinité. – Les Dames de Saint-Chaumond. – Les Cofretiers et les Brodeurs. – Les Filles-Dieu. – Le Cul-de-sac de l'Empereur. – Le Passage du Grand-Cerf. – Les Prêcheurs. – Le Terrier du Roi. – Robert Poquelin. – Le Sire Marchand de Poisson.

      

     

    Le pèlerinage au tombeau de saint Denis, mis en honneur au Ve siècle par sainte Geneviève, a valu son nom à la Grant-Chaussiée-Monsieur-Denis. Mais la rue Saint-Denis proprement dite n'allait encore, sur la fin du XIIe siècle, qu'entre la porte de la deuxième enceinte de la ville, un peu au-dessous de la rue Troussevache, devenue Lareynie, et la porte de la troisième, qui était l'enceinte de Philippe-Auguste, à la hauteur de la rue Mauconseil. En l'an 1418, elle se prolongea de la rue Mauconseil à la rue des Deux-Portes, maintenant Neuve-Saint-Denis (la rue Blondel répond, depuis peu, à l'appel pour la rue Neuve-Saint-Denis), par une extension nouvelle de Paris, puis s'incorpora, sous Louis XIV, la rue de la Sellerie, à laquelle elle faisait suite, en venant aboutir à la porte monumentale qui nous est restée de ce règne. C'était une rue de gala, par laquelle rois et reines faisaient traditionnellement leur entrée solennelle à Paris, et les couvents, les hopitaux s'y suivaient de près, ce qui n'empêchait pas le commerce d'y fleurir de plus en plus.

      

      

    Quartier de la ROQUETTE

      

      

      

      

      

      

      

      

      

      

      

      

      

      

    Un des riches marchands qu'on y remarquait au commencement des guerres de religion était Philippe de Gastine, que le parlement condamna, pour avoir secrètement fait un temple protestant de sa maison, qui fut rasée et remplacée par un monument expiatoire. Ainsi se forma la place Gastine ; mais on ne tarda pas à transférer par pièces aux Saint-Innocents, malgré le peuple en rumeur, le monument qui, d'après une relation du temps, « estoit une haute pyramide de pierre, ayant un crucifix au sommet, dorée et diaprée, avec un récit en lettres d'or, sur le milieu, de ce que dessus, et des vers latins, le tout si confusément et obliquement déduit que plusieurs estimoyent que le composeur de ces vers et inscriptions (on dit que c'estoit Estienne Jodelle, poète français homme, sans religion, et qui n'eut onc autre dieu que le ventre), s'estoit mocqué des catholiques et des huguenots. »

      

     

      

      

    Dès le XVIIe siècle, la rue Saint-Denis faisait relativement autant d'affaires qu'à l'apogée de sa prospérité, sous le règne de Louis-Philippe. Gros marchands y étaient et Leclère, à l'enseigne des Balances et les Mercadé, à la Rose-Blanche ; et Sauvage, drapier, et Leroy, qui tenait les rubans, au Chevalier-du-Guet, et Lefebvre, pour la damasquinerie, au Chêne-Vert, et la meilleure faiseuse de mouches pour faire paraître le teint blanc, à la Perle-des-Mouches. Un épicier-grossier, c'est à dire marchand en gros de plusieurs articles, nommé Jourdan, vendait force huiles d'olive et fruits de Provence, tout en faisant un grand commerce de soie. Les colporteurs savoyards et autres marchands ambulants pouvaient se monter de toute leur pacotille chez le sieur Maillet, près le monastère hospitalier du Sépulcre, à l'image des Trois-Maillets.

    Cette rue aurait été bien moins vivante sans ses hôtelleries, qui servaient de bureaux à des entreprises de transport pour voyageurs et pour marchandises. Le messager de Reims y descendait, à l'enseigne de Sainte-Marthe ; celui d'une autre ligne, aux Deux-Anges ; celui d'Eu, au Cheval-Blanc, et ceux de Soissons, du Quesnoy, d'Arras, de Lille et de Rouen, au Grand-Cerf, on se prenaient, le mercredi et le samedi de chaque semaine, des carrosses faisant le service de Senlis, de Compiègne, de Douai, de Bruxelles, etc.

    Un des célèbres cabarets au cru de la Pomme-de-Pin recevait son monde entre la rue Trousseache et la rue Aubry-le-Boucher, et voici, plus bas, un garni, qui répond à la même enseigne. Colletet aimait mieux s'attabler à la Croix-de-Fer, même rue. Cette auberge était tenue, au milieu du siècle suivant, par Gauge, auquel Gille faisait concurrence, à la Sellette. Le café de Gisors ne réunissait alors que les raffinés du quartier, tout le monde n'osant pas encore mettre les pieds dans un café. On y causait si librement que les marchands de la rue Saint-Denis qui aimaient à s'y rencontrer en passaient pour des esprits-forts, et ils n'étaient guère plus de quatre à se donner cet air voltairien M. Saulnier, mercier à Sainte-Thérèse, M. Hamond, rubanier au Moulinet-d'Or, le patron de la Barbe-d'Or établi au coin d'une des rues qui menaient à Sainte-Opportune, et M. Félix jeune, mercier, assorti de soieries de toutes espèces. Mais il y avait aussi un café des Coches, près des bureaux de voiture.

    Le susnommé Félix avait pour enseigne le Chien-Noir, à l'angle de la rue Troussevache (lisez Lareynie), et nous y retrouvons un Chat-Noir. L'auteur de cette variante a dû être un autre marchand de soieries, détenteur du même fonds de commerce, qui eut pour, fils le célèbre Eugène Scribe. Le père de l'auteur dramatique était dans les affaires quand la rue fut rendue encore plus commerçante par la suppression de toutes les corporations religieuses. Néanmoins, dans son voisinage, à l'angle méridional de la rue des Lombards, les Jeunes-Aveugles prirent la place de l'hôpital des catherinettes, religieuses de Sainte-Catherine.

    Regardez-moi la troisième construction après la rue Aubry-le-Boucher elle appartenait aux sieurs Santeuil, Rapin et Cie. Ces deux noms de poètes ne vous paraissent-ils pas bien aises de s'accoler ? Mais les écrits du père Rapin, qui publiait alternativement des ouvrages de piété et de littérature, en servant Dieu et le monde par semestre, ne l'avaient pas rendu propriétaire, et Santeuil composait ses vers latins à l'abbaye de Saint-Victor, faute d'avoir pignon sur rue. Leurs deux familles, qui s'étaient alliées, comptaient des membres plus fortunés, car plusieurs maisons du quartier étaient à une société dont faisait partie Claude Santeuil, marchand de la rue Saint-Denis, et puis échevin, qui toutefois écrivit des hymnes. Tout à côté de leur maison étaient l'église et l'hôpital du Saint-Sépulcre, dont la première pierre avait été posée l'an 1326. L'hospice était d'abord destiné à recevoir au passage les pèlerins, adorateurs du Saint-Sépulcre, qui allaient à Jérusalem, ou en revenaient : les architectes Hope et Sobre en ont fait un bazar, la cour Batave ; pendant la Révolution, pour une compagnie hollandaise, et plusieurs des anciens corps de logis y subsistent encore, malgré une trouée récemment pratiquée.

    Quartier de la ROQUETTE

    Proclamation de la Constitution, place du Marché des Innocents le 14 septembre 1791 - dessin de Prieur - Musée Carnavalet

      

      

    Moins heureux le couvent de Saint-Magloire ! Il n'en restera plus pierre sur pierre lorsque son ancienne chapelle va être entièrement démolie. Les moines de ce monastère l'ayant quitté pour l'hôpital Saint-Jacques-du-Haut-Pas, Catherine de Médicis y transféra, de l'hôtel de Soissons, des religieuses qu'elle protégeait. L'institution de celles-ci était due au cordelier Jean Tisserand, qui avait converti 200 femmes de mauvaise vie pour qu'elles fissent pénitence en commun, un peu avant le règne de Louis XII. On avait continué, pendant un certain temps, à ne recevoir que des repenties aux mêmes antécédents, et qui ne devaient pas avoir plus de trente ans. Puis les statuts de la maison s'étant absolument modifiés, les plus honnêtes femmes du monde se faisaient dames de Saint-Magloire, si bien qu'on leur confiait l'éducation de jeunes pensionnaires, pour lesquelles on payait 460 livres par an.

    Nous voyons bien encore, près de Saint-Leu, une maison qui appartenait à la fabrique de cette église, et dont l'image était un Aigle : elle a ses cinq étages, mais une seule croisée par étage. C'est un garni, qui agirait sagement en ne louant ses chambres qu'à la nuit ; car l'édilité parisienne nous paraît menacer son échelle locative, dans le but d'isoler Saint-Leu. Ne rend-on pas le même service, en Italie, au trône de Saint-Pierre ? On a déjà jeté bas les Trois-Rois, qui étaient contigus à l'Aigle, et dont le sieur Ménétrier était propriétaire sous le grand règne. L'échevin Sautereau disposait, en ce temps-là, d'une propriété, à l'enseigne de Sainte-Anne, un peu avant la rue aux Ours ; mais le coin même de ladite rue, où pendait le Chef-de-Saint-Jean, appartenait à De Belloy.

    Le cul-de-sac de la Porte-aux-Peintres, dit aussi de l'Ane-Rayé, a l'air d'être respecté par l'autorité absolue qui met Paris sens dessus dessous est-ce par égard pour le sous-titre ? On avait Quartier de la ROQUETTEappelé Porte-aux-Peintres l'ouverture de l'enceinte de Philippe-Auguste sur la rue Saint-Denis, et pourquoi ? Parce qu'eu l'année 1303 un maître peintre, nommé Guillaume Ledoux, avait fait bâtir dans l'impasse, qui était alors une ruelle. L'entrée en reste flanquée de l'ancienne maison à balcon de l'échevin Hélissant, la Ville-de-Rome, et de celle à charmant pignon de Marguerite Poisson, femme séparée de Solliac, avocat. Maison qui porta un Faisan en guise de numéro. Santeuil et Cie n'avaient pas moins de six propriétés un peu plus haut, pâté coupé en deux par la rue du Petit-Hurleur.                                         rue de l'âne rayé.

    Peu de regret laissera le passage Saucède, bâti en 1825 sur l'ancien passage de la Croix de Lorraine la pioche y fait déjà des siennes. L'historiographie parisienne ne perdrait pas grand chose à ce qu'on renversât, faut-il le dire ? Tout ce que l'architecture domestique a produit depuis soixante ans. C'est propre, main dépourvu de caractère et de solidité ; c'est occupé par des gens qui n'ont le temps, que d'y pendre la crémaillère, tant la fortune les fait facilement changer de compartiment d'étage, de quartier ; c'est immeuble et de produit considérable, en ne gardant l'empreinte ni d'une vertu, ni même d'un vice de tell classe plutôt que de telle autre, ni d'un seul des mobiliers qui passent en si grand nombre que le déménagement les use, ni d'une famille ou d'un homme sans famille et encore bien moins d'une idée. Une échoppe, de savetier, qui d'elle-même est venue s'accoter à un châteaux, à une église, et que personne n'ose déranger pendant un millier d'années, en dira toujours plus que toutes les belles façades d’un nouveau boulevard, alignées comme ses rambuteaux. Que léguera donc de grand au vingtième siècle le remaniement actuel de la ville qui nous était chère ? la voix publique.

    Les enseignes commerciales n'attendent pas toujours l'expropriation pour changer de place, et l’Autruche nous en donne la preuve. Elle pendait d'abord à une porte peu éloignée de la rue du Petit-Hurleur, et Denévers, plumassier-fleuriste, en a transporté le tableau une cinquantaine de maisons plus haut c'est encore l'emblème du commerce que continue le petit-fils du fondateur. Pareille longévité manque à l'ancien établissement de Mm Bertin, fameuse marchande de modes ; puisqu'il n'est plus rue Saint-Denis.

      

    Quartier de la ROQUETTE

    Franchissez la rue Grenéta, pour entrer dans là cour des Bleus, dénomination qui rappelle que les enfants pauvres reçus à l'hôpital de la Trinité depuis l'année1545 allaient vêtus de cette couleur. Ledit hôpital avait été fondé au commencement du XIIIe siècle près la fontaine de la Reine, rue d Arnetal ou Grenéta, pour donner asile à des voyageurs qui, après l'heure du couvre-feu, trouvaient close la porte de Paris. Les confrères de la Passion y avaient commencé sous Charles VI et fini sous François Ier de jouer leurs mystères et leurs soties, premiers genres abordés sur la scène française. Le roi suivant fit établir, au même endroit, des manufactures et des boutiques pour les donner aux compagnons qui venaient apprendre leur métier aux enfants-bleus. On louait de ces apprentis pour assister à des enterrements leurs larmes ne coûtaient pas trop cher. Tout l'enclos de la Trinité était un lieu de franchise pour les artisans, outre que des immunités aidaient les enfants-bleus à passer maîtres.

    Le plumassier Herbault, il y a deux siècles, était déjà à la tête d'un établissement, dans les parages de celui du même genre qui s'annonce ainsi : Ancienne maison Prévost-Wenzel fondée en 1784. Rappelons. Toutefois que le Wenzel qui était fournisseur de Marie-Antoinette n'a jamais demeuré rue Saint-Denis.

    Les filles de l'Union-Chrétienne s'installèrent dès l'année 1683 dans un hôtel bâti, encore plus haut, pour le marquis Melchior Mitte de Saint-Chaumont, à la place de la cour Bellot et de plusieurs constructions achetées par le même en 1631. De plus, le maréchal de la Feuillade y avait résidé ; il y avait fait fondre la statue de Louis XIV, qu'il destinait à la place des Victoires. Les dames dites de Saint-Chaumont, qui avaient commencé par se vouer spécialement à l'instruction des nouvelles catholiques, prenaient ensuite pour pensionnaires des jeunes personnes de la bourgeoisie, tout comme les filles de Saint-Magloire. Leur chapelle de la rue Saint-Denis devant être entièrement reconstruite par Convers, la princesse de Conti en posa la première pierre en 1781, c'est de nos jours un magasin de nouveautés à l'enseigne de Marie-Stuart. Un bâtiment superbe, qui donne actuellement sur le boulevard de Strasbourg (notre boulevard Sébastopol s'appelait tout d'abord de Strasbourg), avait été l'hôtel de M. de Saint-Chaumont.

    Traversons maintenant la rue, et suivons-en l'autre côté dans le sens opposé à l'ordre numérique, qu'il nous faut négliger comme moyen d'indication dans les rues où, cet ordre va être entièrement remanié. La seconde encoignure de la rue Bourbon-Villeneuve (la rue Bourbon-Villeneuve fait maintenant partie de celle d'Aboukir), à partir du boulevard, portait l'image de Sainte-Véronique, et la seconde encoignure de la rue Sainte-Foy, l'image de Notre-Dame-de-Liesse.

    A quelques pas, en marchant dans le même sens, remarquez-vous une maison à belles ferrures ? Le XVIIIe siècle y réunissait le bureau du Contrôle des exploits et des formules des notaires, le bureau des Brodeurs et celui des Coffretiers. Les statuts de la confrérie professionnelle des Coffretiers, Malletiers et Gainiers, dite primitivement des Layetiers-Ecreniers, dont le patron fut saint Jean Porte-Latine, puis saint Fiacre, dataient de l'an 1696 : ils défendaient de travailler avant cinq heures du matin et après huit heures du soir, pour ménager le repos des voisins, et fixaient la durée de l'apprentissage à cinq années, celle du compagnonnage pareillement, le prix du brevet à 60 livres, celui de la maîtrise à 700. La communauté des Brodeurs, sous les auspices de saint Clair, était aussi celle des Passementiers et des Boutonniers, lesquels ne constituaient qu'un corps d'état, dit des Chasubliers en 1648, époque où remontait son règlement : six ans d'apprentissage, trois de compagnonnage, 30 livres le brevet et 600 la maîtrise. Le bureau des Brodeurs avait été rue Montorgueil ; il demeura rue Saint-Denis jusqu'à la suppression de toutes les corporations industrielles.

    L'une des portes des Filles-Dieu, couvent dont nous avons revu des bâtiments rue Bourbon-Villeneuve, est l'entrée du passage du Caire depuis l'année 1798. Quelques portes plus bas se reconnaît l'ancienne cour Sainte-Catherine, à laquelle faisait vis-à-vis une cour de François Ier. Les hospitalières de Sainte-Catherine avaient là leur maison de campagne ; puis un pâté de huit maisons, qui en tenait la place, et notamment un hôtel Dupressoir, avec sortie sur la cour des Miracles la majeure partie desdites constructions est encore debout.

    Une ruelle de l'Empereur, déjà connue au siècle XVI, réduite en cul-de-sac de l'Empereur en 1657, parut, indigne de cet auguste nom quand l'Empire sortit de la coque du Consulat on l'appela impasse Mauconseil. Ce qu'on y voit de plus que séculaire avait appartenu préalablement à la proclamation dudit empire, au nommé Vauvelard, ex-maître d'hôtel de la reine, et à Trudaine, maître des requêtes.

    Il y avait donc toutes sortes de souvenirs, évoqués sur les portes de la rue Saint-Denis par des légendes ou des figures ; mais on était ramené au positif en y lisant çà et là Aux Louis-d'Or, au Berceau-d'Or et d'autres dédicaces purement marchandes, dont la bonne renommée faisait la gloire d'autant d'honnêtes familles. La profession religieuse n'avait pas empêché de grandir et de se rendre honorable l'esprit du commerce, dans ce quartier, qui en était devenu un grand centre d'affaires, avant même de jeter le froc aux orties. Près de la rue du Renard, un Renard faisait bien, et le règne de Louis XVI y vit, de plus, une hôtellerie du Renard-Rouge. Celle, du Grand-Cerf, avec seconde issue rue, des Deux-Portes, recevait encore un plus grand nombre de voyageurs que le Renard-Rouge, à cette époque, et payait de loyer des lieux qu'elle occupait aux catherinettes du coin de la rue des Lombards. Au travers de l'hôtel, un passage du Grand-Cerf se faisait déjà jour antérieurement à la Révolution ; mais il était à ciel ouvert, et un roulage ne cessa d'y charger ses camions que quand une compagnie mit les passants, en 1824, à l'abri de l'intempérie des saisons.Quartier de la ROQUETTE

    Nous avons lu partout que la rue des Prêcheurs tire sa dénomination d'une enseigne ; ajoutons que cette enseigne est encore déchiffrable à l'un des angles de la rue Saint-Denis une sculpture en arête nous y montre des capucins sur un arbre perchés. Un ciseau du XVIe siècle

    passage du cerf.

      

      

    parait avoir fouillé la pierre. Par conséquent, nous pouvons croire que les quatre religieux de Saint-François, appelés en France par le cardinal de Lorraine, pour y introduire la réforme due à l'initiative de François Baschi, l'un des leurs, s'arrêtèrent sur ce point, avant de repasser en Italie.

    Nous avons bien trouvé qu'une déclaration de cens fut faite au Terrier du roi, en 1701, par Nicolas Thénard, Augustin Barat et Charles Mercey, prêtres, religieux et procureurs généraux du couvent des Célestins à Paris, pour une maison de la rue Saint-Denis, à l'emblème du Papillon ; mais celle-ci était située à proximité de la rue de la Grande-Truanderie, un peu avant le Singe-Vert, qui, trente années auparavant, était l'objet d'une reconnaissance identique, signée par Marie-Angélique, prieure, Marie-Luce, sous-supérieure, et Marie-Françoise-Paule, procureuse, religieuses du couvent des Filles-Bleues-de-l'Annonciade. Ce qui reporte la déclaration de Carrier, trésorier de France pour les Gros-Raisins, au premier coin de la rue des Prêcheurs, et celle de Lirot, marchand, pour le Heaume, au second coin.

    Reconnaissance passée également, le 8 janvier 1668, devant Le Fouin, notaire au Châtelet, pour deux maisons sises entre la rue de la Cossonnerie et la rue aux Fers (l'ancienne rue aux Fers a nom Berger), par Guillaume de Lamoignon, premier président au parlement, Robert Poquelin, juge-consul, et Jean de Faverolles, premier échevin, tous trois comme gouverneurs et administrateurs du Saint-Sépulcre.

    Les haudriettes de l'Assomption, religieuses de la rue Saint-Honoré, avaient en 1728 dans l'Ours-Blanc deux petits corps de logis, même rue, entre une maison à l'hôpital du Saint-Esprit et une autre à Mme Fogerie. Les maîtresses et bonnes femmes de la chapelle feu Etienne Haudry avaient acquis cette propriété autrefois de sire de la Fontaine, vendeur de poissons de mer, et de charlotte de Corey, sa femme.

      

    sources : http://www.paris-pittoresque.com/rues/190.htm

     

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    Quartier de la ROQUETTE

    RUE DE NESLES, naguère d'Anjou-Dauphine
    (D'après Histoire de Paris rue par rue, maison par maison, paru en 1875)

    Notice écrite en 1856. Depuis est survenu dans la dénomination de la rue un changement, qui rappelle qu'elle avoisina longtemps le grand et le petit Nesles.

     N° 2, 3, 8, 13 :
    En l'année 1607, cette petite rue reçut le double nom de prince et de princesse qui la fait rue hermaphrodite. Plusieurs de ses maisons existaient déjà de longue date, notamment le n°8, qui, depuis 1788, est le siège de la Société polymatique, et qui passe pour avoir appartenu jadis à la reine Blanche. On voit encore, sous le n° 13, le passage souterrain qui conduisait discrètement Marguerite de Bourgogne à la tour de Nesle.

      

    Quartier de la ROQUETTE

    Tout sentirait le moisi dans cette vieille ruelle si, dans le nombre des ouvrières brocheuses qui y travaillent ou qui l'habitent, il n'en restait pas de piquantes, que l'air conservateur d'un autre temps a conservées grisettes. Il n'y a pas que des duègnes et des bossues dans les logements d'une maison que le tassement à contrefaite et que les lézardes ont balafrée, avant de se couvrir d'emplâtres.

    II faut pourtant convenir que, pendant la Révolution, le cul-de-jatte Martin, tireur de cartes, paraissait à sa place dans un galetas, sous les toits de ce 8 ou de ce 13. L'escalier de l'étage suprême était étroit et rappelait un mot d'Horace : Angustam pauperiem pati. Martin, qui affichait une pauvreté cynique, gagnait néanmoins pas mal d'argent.

      

    Quartier de la ROQUETTE

    La maison de la rue d'Anjou n° 2 montre sur la rue Dauphine, au-dessous de la boutique d'un graveur, un Hercule en terre cuite qui porte un monde en cuivre : cela n'est pas assez mal fait pour qu'on ait eu raison de le cacher sous une couche de peinture verte. Un marchand de drap s'est gratifié de cette enseigne vers la fin du règne de Louis XVI.

    Le 3 ne fut-il pas un lieu de rendez-vous pour Henri IV et la belle Gabrielle ? Cette maison, qui fait aussi le coin de la rue Dauphine, a gardé, dit-on, rue d'Anjou l'entrée secrète de l'auguste vert-galant.

    En 1714 on comptait, rue d'Anjou-Dauphine, 10 maisons, éclairées seulement par 2 lanternes, comme pour favoriser encore le mystère et l'amour nocturnes, malgré Mme de Maintenon.

     

    sources : http://www.paris-pittoresque.com/rues/8.htm

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